À la fin de ses études secondaires, il poursuit ses trois années de formation à l’INFAC (actuellement EFP) à Bruxelles : "On est moins dans un cursus scolaire mais plutôt dans un échange. C’est une formation qui s’apprend sur le terrain", explique-t-il. Il effectue alors des stages dans les théâtres bruxellois et découvre le Festival de Théâtre Jeune Public de Huy en 1995 : "Je n’étais plus un enfant, mais je n’étais pas encore parent non plus. Ce fut donc une découverte. J’ai adoré le spectacle ‘Cabane’ du Tof Théâtre et j’ai demandé à faire un stage chez eux."
C’est ainsi que Dimitri entame sa carrière dans le théâtre pour enfants et adolescents. À la fin de son stage, il est engagé comme régisseur au Tof Théâtre, à Genappe. Il y travaillera de manière permanente pendant 10 ans, avant de commencer à travailler pour d’autres compagnies de théâtre jeune public, mais en continuant de fréquenter la compagnie brabançonne sur des projets plus ponctuels.
"Je suis avant tout un régisseur, c’est-à-dire que j’accompagne le spectacle en tournée pour m’occuper de la gestion et l’installation des lumières, du son, des décors, de la vidéo, etc. Cela représente 90% de mon temps de travail. Les autres 10% sont consacrés à ma spécialité : la création lumière des spectacles. Pour certains spectacles, je ne m’occupe que de la régie, pour d’autres uniquement de la création ou bien des deux, c’est au cas par cas", confie Dimitri. Avec près de 120 représentations par an, Dimitri Joukovski comptabilise près de 2400 représentations en 20 années de carrière : "J’aime le travail dans une compagnie de théâtre jeune public, cela me permet de défendre un spectacle dans une petite structure : la création se fait en discutant avec le metteur en scène ou le scénographe, les comédiens participent généralement au montage, etc."
Alors qu’il était encore enfant, ses parents l’emmenaient aux quatre coins de la Belgique pour voir des spectacles : "J’ai vu des centaines de spectacles et j’en ai des souvenirs fantastiques, dit-il avec enthousiasme. Le théâtre jeune public a été créé pour amener la culture dans les écoles, mais il y a eu ensuite une volonté d’emmener les enfants dans les salles de spectacle. On participe à une certaine éducation, à leur donner goût au spectacle vivant, en espérant qu’ils aillent ensuite découvrir d’autres disciplines artistiques : théâtre, musique, cirque, etc. Même si tous les enfants n’ont pas encore la possibilité d’aller au théâtre et qu’on pourrait encore faire plus, le réseau jeune public en Belgique est un des mieux développé et mieux diffusé. C’est une chance."
Les compagnies avec lesquelles Dimitri travaille sont itinérantes, se déplacent de villes en villages pour aller à la rencontre des jeunes spectateurs : "Au plus un spectacle est autonome, au plus il a de chances de tourner. Le premier achat pour une compagnie qui débute, c’est donc une camionnette ! Elle est indispensable pour transporter notre matériel. Comme nous jouons en Belgique, mais aussi en France, nous faisons beaucoup de kilomètres sur une année", explique-t-il.
Et quand on évoque l’utilité et les émotions que procurent une pièce de théâtre, Dimitri nous confie : "C’est un métier utile et futile en même temps. Futile, car il n’est peut-être pas vital, comme peut l’être un agriculteur qui nourrit l’humanité. Mais utile car c’est une nourriture de l’esprit. On nourrit l’émotion. Le théâtre vivant est un équilibre très fragile. C’est une alchimie entre les comédiens et les spectateurs. On a l’émotion en face de soi et on peut passer à côté. De plus, avec les enfants, surtout les plus petits, on sait rapidement si cela marche ou pas…"
Ludovic Devriendt